Depuis 3 ans l'Association France Glaucome attribue une bourse de recherche sur des projets de recherche en lien avec le glaucome. En 2025, elle renouvelle un appel à candidature. L'appel à candidature en pdf Le règlement en pdf Le dossier de candidature...
Témoignage de :
Monsieur F. père de la petite L. 7 ans
Le glaucome, une maladie pernicieuse et indolore !
Pouvez-vous nous parler un peu de votre vécu concernant cette maladie ?
J’ai 3 enfants et j’habite Paris. C’est ma deuxième fille âgée de 7 ans qui est touchée par le glaucome.
C’est lors d’un jour de grève des enseignants que je décide un matin d’emmener ma fille L. âgée de 7 ans dans un centre ophtalmologiste pour sa première consultation. J’ai pu prendre un rendez-vous pour le matin même. La petite y voit bien, elle a 10/10. Elle a juste une petite hypermétropie, jusque-là tout va bien.
Elle ne se plaignait pas d’avoir mal aux yeux auprès de ses parents. Il n’y a pas eu de prise de tension oculaire car elle n’est malheureusement pas systématique et c’est regrettable. L’orthoptiste demande à L. si elle ressent des douleurs ou une gêne à l’œil, la tête ou la tempe que ce soit à la maison ou à l’école lors de la lecture. Et à ma grande stupéfaction L. lui montre avec sa main qu’elle a parfois une douleur au niveau de la tempe du côté de l’œil droit. Le docteur nous dit de faire un fond de l’œil et de reprendre un rendez-vous pour pouvoir instiller les gouttes avant la prochaine consultation. Je demande à revenir l’après-midi même si jusqu’ici tout allait bien et j’aurais pu faire traîner les choses jusqu’au prochain rendez-vous. Rendez-vous pris pour l’après-midi même donc.
Lors de la consultation, le docteur me pose beaucoup de questions sur son état de santé (antécédents familiaux, diabète, crise d’épilepsie, etc..). On nous fait patienter en salle d’attente, entre temps elle pratique un OCT. L’orthoptiste cette fois-ci la revoie pour une prise tension à l’air et le résultat est le suivant : 30 à l’œil gauche et à droite, après plusieurs essais, impossible d’obtenir un chiffre tellement la tension était élevée. Le docteur m’explique alors que L. a une asymétrie papillaire. Elle me montre sur une image la comparaison des deux yeux, et me fournit une lettre de recommandation pour la Fondation Rothschild à Paris et me précise de faire vite. Je sens de l’inquiétude et lui demande si c’est grave. Elle me répond qu’elle ne peut pas se prononcer car elle n’a pas le matériel adéquat pour effectuer un bon pronostic. Je lui demande si elle a déjà vu ce genre de cas et elle me répond « oui, mais pas chez un enfant ».
C’est à ce moment-là que tout a basculé et que je vais me retrouver seul, sans réponses, avec de la peur et de l’angoisse et surtout sans traitement immédiat pour ma fille car le docteur n’a prescrit aucun traitement alors qu’il y a urgence à faire baisser la tension des yeux. Aussitôt sorti du centre, j’appelle la Fondation Rothschild, et on me demande d’envoyer une demande par mail ainsi qu’une lettre de recommandation du docteur. On me précise que les rendez-vous ne se font pas par téléphone et qu’il peut y avoir de l’attente avant une réponse. Nous rentrons à la maison, ma fille et moi. Je préviens ma femme et je regarde ce que veut dire « excavation papillaire » sur internet. Ce terme me renvoie à un seul mot « glaucome ». Je lis un peu plus et la réponse est lapidaire « deuxième cas de cécité dans les pays développés ». Je m’effondre, je craque et je fonds en larmes.
Je l’emmène aux urgences de Rothschild. Une interne la prend en charge. On lui prescrit un traitement de collyres (3 fois par jour pour chaque œil) ; sinon on ne me dit rien. On ne m’explique rien tant que L. n’aura pas passer d’autres examens sur rendez-vous.
Ma douleur est intense, c’est mon enfant, et je veux le meilleur pour elle. Le lendemain, j’appelle la fondation Rothschild, demandant à parler à un docteur ainsi qu’une date de rendez-vous. Ce n’est pas possible, il faut attendre. J’étais à bout et j’entre dans une période de dépression, je ne mange plus, je ne sors plus, je pleure tout le temps, je ne dors plus. Je ressasse les choses dans ma tête jour et nuit, en permanence. Je suis arrêté par mon médecin qui me rassure en me disant que ça se traite bien et qu’elle ne perdra pas la vue car c’est ce qui me hantait.
Qu’est-ce qui vous a donné l’envie d’adhérer à l’AFG ?
Je sais qu’il existe des associations pour beaucoup de causes. Je cherche donc sur Internet et je trouve l’Association France Glaucome. C’était un dimanche, j’appelle quand même tellement j’étais mal. Je laisse un message vocal demandant de l’aide.
Le lendemain matin, trois personnes me contactent par téléphone. Tout d’abord Josée, la secrétaire générale, puis Anne-Marie qui s’occupe de la Nouvelle Aquitaine et enfin Michel chargé de la région parisienne. Josée m’a expliqué les étapes de la prise en charge d’un nouveau patient glaucomateux et que si l’attente était insoutenable je pouvais aussi consulter un ophtalmologiste spécialisé dans le glaucome afin de connaître l’état du glaucome sur ma fille. Anne-Maire s’est montrée rassurante, elle m’a dit que le point positif est que L. a été décelée très tôt. Elle m’a réconforté, elle m’a aussi envoyé un lien avec une notice en images pour montrer comment instiller des collyres et surtout elle m’a expliqué que j’avais le droit à un second avis médical, et d’ajouter que la médecine a fait beaucoup de progrès notamment sur le glaucome. Michel m’a bien expliqué des éléments importants concernant cette maladie : qu’est-ce que le glaucome, un OCT, un champ visuel, l’importance de prendre son traitement de collyres à heure fixe, où mettre le doigt, pourquoi appuyer 2-3 minutes au coin de l’œil, etc. Ils ont eu la gentillesse de me rappeler et je les en remercie énormément.
Deux semaines plus tard, arrive enfin le rendez-vous à la Fondation Rothschild. L. accuse toujours 24-27 de tension, ce qui reste très élevé. Ce docteur part en congé maternité.
Un mois plus tard, L. est donc examinée par un autre docteur. La maman de L. a assuré le rendez-vous et le docteur par manque de temps ne pouvait pas répondre à toutes ses questions, il ne montrait pas d’empathie. Les tensions étaient de 21-24. Le médecin change de traitement pour quelque chose de plus fort mais le prochain rendez-vous est fixé dans 45 jours. C’est très dur!.
Quelques jours plus tard, un matin, L. a les yeux rouges, je devais amener ma fille à l’école.
Je ne sais pas quoi faire, j’appelle les urgences mais cela ne répond pas. Pris de panique, j’appelle Anne-Marie qui me conseille, au vu de la situation et de son jeune âge, de l’emmener aux urgences. La tension affiche 34 à un œil, 26 à l’autre. C’est trop, on lui rajoute un traitement médicamenteux en comprimé, l’acétazolamide, et on commence à me parler d’une chirurgie filtrante et de tout ce qui va avec notamment ses risques.
Mais je n’ai pas confiance en ce docteur qui ne montre aucune considération à ma fille.
Perdu, je vais voir un spécialiste du glaucome, dans son cabinet qui se trouve à Paris, le Docteur Lachkar qui est une sommité dans son domaine.
C’est le premier à me rassurer sur l’état actuel des yeux de ma fille. Il me dit que l’œil gauche va bien, mais l’œil droit va moins bien et que pour l’œil droit, il fallait passer par une chirurgie filtrante. Il nous a bien tout expliqué et a répondu à toutes nos questions. Je lui demande d’assurer la trabéculectomie mais comme beaucoup d’autres docteurs, il n’opère plus les enfants car ils n’ont pas la structure adaptée.
Je sollicite l’hôpital pour enfants Necker. Au premier rendez-vous vers mi-juin à Necker, c’est un jeune Docteur, Romain Milheiro, qui la prend en charge. Il explique à L. ce qu’elle a et ce qu’il faut faire. Lors des consultations qui ont précédé la chirurgie, je l’ai vu à la fois calme et expérimenté. La chirurgie de l’œil droit uniquement est prévue pour le 5 octobre.
Entre temps nous partons tous en vacances aux États-Unis pour voir la belle famille. Cela nous a fait du bien, à tous et L. a retrouvé un meilleur moral.
Le Dr Milheiro a opéré l’œil droit sous anesthésie générale. Il a réalisé une trabéculectomie externe qui est moins invasive, qu’on appelle sclérectomie avec une bulle de filtration. L’opération s’est très bien déroulée. Six semaines de surveillance sont nécessaires. Bien sûr, L. était K.O. suite à l’anesthésie, elle avait deux pansements et une coque. Le lendemain, le docteur lui a retiré les deux pansements et la coque.
Par la suite, j’ai appris que beaucoup de glaucomes chez les enfants étaient des glaucomes secondaires (une autre maladie entraînant un glaucome).
Heureusement, L. a un glaucome juvénile ce qui signifie une seule maladie à gérer.
Que voulez-vous ajouter sur cette maladie que vous nommez vous-même comme étant pernicieuse et indolore ?
Je dirai que le traitement du glaucome de ma fille compte trois étapes :
• La prise en charge : elle a été très dure pour toute la famille et complexe pour que L. soit examinée puis traitée. Un vrai parcours du combattant ! Heureusement qu’il y avait l’Association France Glaucome qui m’a aidé et soutenu.
• L’opération : je pensais que cela allait être très dur et finalement non. Il est vrai que le chirurgien a été très, très bien. J’avais confiance et cela a fait toute la différence. Je dirai même que c’est 50 % du travail.
Six semaines de traitement. Les trois premiers jours, L. devait mettre des gouttes antibiotiques plusieurs fois par jour sur l’œil opéré. Elle a eu une micro fuite au début, donc la tension a été un peu basse mais le docteur nous a dit de ne pas nous inquiéter et d’appliquer une crème cicatrisante. Cela devait se réguler tout seul, ce qui a été le cas. La tension est remontée à 10. Esthétiquement l’opération ne se voit pas, ce qui m’inquiétait beaucoup.
L’opération est une vraie réussite en soi. L’intervention étant moins invasive, cela a évité des risques. Le Docteur Milheiro comme le Docteur Lachkar sont des personnes investies et cela fait du bien pour nous qui nous inquiétons.
• Le suivi à vie : vivre avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête, ce n’est pas facile mais c’est ainsi, il faut l’accepter. Et surtout j’ai confiance en la recherche et de toutes les avancées.
Pourquoi avez-vous eu envie de témoigner auprès de l’AFG ?
Ce qui me surprend le plus est qu’il s’agit d’une maladie dont personne n’était au courant chez nous. Elle est vraiment peu connue du grand public surtout des jeunes car cela touche principalement des adultes mais en discutant autour de moi, je me suis rendu compte que beaucoup de personnes étaient atteintes du glaucome : des collègues, un voisin, les parents d’amis proches… Le fait de ne pas en parler est préjudiciable.
Chez les enfants, c’est rare mais malheureusement cela peut arriver et j’aurais aimé avoir le témoignage d’un parent.
Comment va L. aujourd’hui ?
Son moral est excellent. Déjà avant l’opération, suite à notre voyage aux États-Unis qui nous a changé totalement du quotidien et nous a donné un vrai bol d’air et insufflé plus d’énergie. Et l’opération étant un succès, elle a bien meilleur moral depuis.
Malgré tout, cela reste une enfant et parfois, l’interrompre durant une activité pour mettre les collyres ou bien au réveil chaque matin également le week-end ou en vacances, ça peut être difficile mais c’est normal à son âge.
Voulez-vous ajouter un dernier mot ?
Heureusement que les membres de l’AFG ont été là. Ce sont eux qui m’ont relevé. Ils m’ont aidé à comprendre la maladie et m’accompagner à chaque étape de ce long parcours. Sans eux je n’aurais pas su que j’avais le droit d’avoir un second avis et ils ont ajouté que c’est normal de vouloir les meilleurs chirurgiens pour sa fille. Elle a pu voir plusieurs docteurs dont les meilleurs et surtout particulièrement investis.
Ce sont des gens à l’écoute, toujours disponibles. Ils n’hésitent pas à prendre régulièrement des nouvelles de L. Ils assurent un véritable suivi et ils rappellent systématiquement quand je n’ai pas pu les avoir au téléphone.
Je tiens également à remercier l’AFG pour avoir pu bénéficier d’un rendez-vous avec la psychologue. J’en avais besoin. Elle m’a beaucoup aidé.
Je soulignerai surtout le côté humain des membres de l’association. Tout s’arrange et c’est l’essentiel.
Nous en sommes ravis, nous aussi, et nous souhaitons une belle vie à L.